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6 janvier 2007 6 06 /01 /janvier /2007 20:02

 

Sans Foie ni l'Oie

Des Pyramides à nos Clochers

Durant les fêtes de fin d'année des tonnes de foie gras, de magret de canard, de rillettes et de diverses terrines ont été amplement dégustées, flattant le palais des plus fins gourmets. Mais d'où proviennent ces produits que l'on pourrait qualifier de luxe, réservés pour les grandes occasions ?

Comment se pratique l'élevage de l'oie et sa transformation ? D'où vient l'origine du gavage ? ...

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A Pléhédel près de Lanloup, la ferme de Michel TACON.

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Michel Tacon est un jeune aviculteur installé à près de Lanloup au lieu dit Goasquiou en Pléhédel. Devant son cheptel de 500 oies, il explique son engouement pour son élevage.

<< Je suis maçon de métier, lors de mes divers séjours dans le Sud-Ouest de la France, j'ai été séduit par la beauté de l'oie >>

A chaque retour de vacances, Michel rapportait << dans ses valises >> un ou deux couples d'oies et même une fois une cinquantaine d'oisons qui cacardaient joyeusement dans le coffre de sa voiture et qui venaient enrichir son élevage pour son plaisir personnel.

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Sarlat dans le Périgord.

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<< Lors d'un ultime voyage dans le Périgord, dans la région de Sarlat, j'ai contacté des éleveurs spécialistes du foie gras et de la transformation de l'oie, pour envisager de métamorphoser ma passion en profession >>

Michel habite une fermette rénovée, entourée d'un bois, d'un étang et de deux hectares de terres qu'il ensème de blé et de maïs utiles à son élevage. Toutes les conditions étaient réunies pour se lancer dans l'aviculture.

Comme dit le proverbe c'est au pied du mur que l'on voit le maçon. Le maçon se mit à l'oeuvre pour bâtir en solitaire son entreprise.

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Moi les fêtes, ça me gave !

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Une salle d'engraissage, une salle d'abattage et de plumage, une salle d'éviscération et un laboratoire de transformation, le tout entièrement carrelé de faïence blanche, conformes aux normes sanitaires allaient sortir de terre. Ce qui suscitait tout de même de gros investissements.

Pour obtenir son brevet d'aviculteur, Michel Tacon a suivi un stage au centre de formation professionnelle et de promotion sociale à la station expérimentale d'aviculture de Ploufragan. Mais il a acquis la technique et le savoir-faire à Miniac Morvan en Ile-et-Vilaine chez un éleveur.

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Heureux comme un canard sur l'eau !

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Victimes d'elles mêmes

Mais avant de débuter la visite, Michel nous conte l'historique de l'oie. Qui a inventé le gavage ?... Personne ! ce sont les Egyptiens qui observent les premiers le phénomène.

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Au moment des migrations, les oies sauvages doivent parcourir des milliers de kilomètres sans chercher de nourriture. Avant de partir, elles emmagasinent d'énormes réserves d'énergie qu'elles stockent sous forme de graisse dans leur foie, en mangeant démesurément (en se gavant).

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Un élevage dans le Périgord.

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Des spécimens capturés avant d'avoir pu décoller ont permis aux Egyptiens de découvrir les plaisirs de la cuisine fine bouche à travers le foie gras. Ce qui leur à donné l'idée du moins à certains d'arrêter la construction de pyramides dans leur jardin pour s'adonner à l'élevage et au gavage des Acérinés.

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De nos jours, deux grandes régions se partagent le marché français du foie gras, le Sud-Ouest et l'Alsace. Dans cette dernière, on le cuisine avec un assortiment d'épices, ce qui le rend très parfumé mais lui donne une couleur un peu grisée.

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Dans le Sud-Ouest, on y ajoute seulement de l'alcool, ce qui lui préserve son goût naturel de saveur noisette et lui garde sa belle couleur rosée, comme le disent si bien les Périgourdins : << Il est rosé comme le derrière d'un ange >>.

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 La consommation nationale progresse annuellement de 12 %, mais l'offre ne satisfait pas la demande d'où la nécessité d'importer du foie en provenance de Hongrie, de Tchécoslovaquie, d'Autriche, de Pologne et d'Israël. En 1984, un tiers de la production seulement était française.

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Alors les filles...

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La reproduction

On resterait bien volontiers admirer la baignade des oies reproductrices sur le plan d'eau entouré de verdure et bordé d'arbres, mais la visite se poursuit en suivant étape par étape les tribulations de l'oie.

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<< Je garde mes oies reproductrices cinq ans, ce n'est pas par romantisme que les oies s'accouplent sur l'eau (surtout en plein mois de décembre par un froid de canard, ça vous donne la chair de poule). Mais par nécessité, car le Jars qui est assez maladroit sur terre pour mener à bien la fécondation se trouve plus à l'aise en milieu aquatique >>.

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Un peu d'excercice après les fêtes.

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Un Jars peut féconder de trois à quatre femelles, qui durant la saison de février à juin pondent chacune 35 à 40 oeufs. La période d'incubation dure 30 jours à une température de 37°6, avec un retournement des oeufs toutes les deux heures minimum.

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L'oison, à son éclosion, pèse 120 grammes et après une brève diète aura, pour alimentation et jusqu'au troisième mois, du maïs moulu. Au terme du troisième mois, débute, pour trois à quatre semaines la phase de prégavage, qui va soumettre l'oie à un régime alimentaire riche en protéine, donné à l'aide d'un gaveur électrique à heure fixe, ce qui habituera l'animal à consommer une grosse quantité de nourriture dans un minimum de temps.

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Une belle basse-cour.

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Dame oie a maintenant cinq mois. Habituée à son régime, elle va passer au stade du gavage. Cette dernière phase d'alimentation va se poursuivre durant trois semaines et va conditionner le volatile à ingurgiter grâce au tour de main expert de Michel qui aide la nourriture provenant du gaveur à descendre dans le jabot : une grande quantité d'aliments énergétiques déséquilibrés est ainsi avalée, ce qui entraîne un engraissement intensif et par conséquent la formation du foie gras. 

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L'opération de gavage.

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<< Lors de la première semaine de gavage, je leur donne une alimentation composée de 80 % de maïs écrasé auquel j'additionne 20 % d'une autre céréale, la fétrole, soit une ration journalière de 600 à 800 grammes. Par la suite, seul du maïs écrasé cuit dans de la graisse d'oie sera utilisé et ingurgité pour atteindre en fin de cycle la ration de 1.2 kg absorbé en trois reprises, à 6h, 14h et 22h.

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Les oies dans un enclos métalique.

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Michel gave donc ses oies toutes les huit heures et passe trois minutes à chaque fois par volatile. Durant la période de gavage, les oies sont parquées dans un enclos métallique à une densité de trois bêtes par mettre carré. Mais plus elles sont  nombreuses, moins elles bougent et plus elles engraissent rapidement.

 

Huumm !

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La transformation

A partir du 12ème jour, l'oie commence à transpirer (elle fait du lard), mais dès qu'elle commence à donner des signes de fatigue anormale, elle doit être rapidement saignée pour préserver la qualité de son foie. Elles sont auparavant étourdies à l'électricité avant que la carotide ne leur soit tranchée dans le saignoir situé dans la salle d'abattage.

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Une fois plumés de beaux spécimens peuvent atteindre les dix kilos, et le foie, partie noble de l'animal, avoisine les 10% du poids. Le long travail de Michel Tacon ne s'arrête pas là, dans son laboratoire << Il revêt sa toque >> pour cuisiner avec finesse les diverses parties de l'oie ou du canard.

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Un peu d'anatomie !

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Sous vide ou en terrine, foie gras, magret, gésiers confits, rillettes, cassoulet... quittent la ferme de Goasquiou pour être vendus sur les divers marchés de Bretagne, Morlaix, Rennes, Paimpol, Plouha... ainsi que chez les traiteurs, les restaurateurs, les commerçants et dans les comités d'entreprises.

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Arrivée dans votre assiette.

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Très attaché aux recettes traditionnelles, comme tout bon artisan, Michel, en plus de son savoir-faire, a aussi ses petits secrets culinaires qu'il refuse de révéler.

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Merci d'être venue...

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25 ans, mais plus une dent

L'élevage de Goasquiou peut atteindre une production annuelle de 1800 oies et de 500 canards, ce dernier est plus avantageux car il ne demande qu'à être gavé que deux fois par jour et engraisse plus rapidement. 

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Si dans un cochon tout est bon, dans l'oie aussi, le plumages peut être également vendu pour la confection de couette (pour le duvet) et la confection de cure-dents pour les grosses plumes.

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Sa viande rouge, ferme, très tendre, a une saveur particulière qui détrônerait aisément la dinde si la production française était plus importante. Ce qui diminuerait considérablement son prix qui demeure hélas élevé mais pourtant justifié. D'où un marché à exploiter, la concurrence étant très rare dans notre région.

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Pour ne pas clore ce chapitre sur une note nostalgique de conserve (avec la mort du cygne) sachez que certaines oies disparaissent aussi de leur belle mort et peuvent paisiblement s'éteindre à l'âge de 25 ans sans avoir connu durant leur vie des problèmes... de foie.

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Jean-Yves ROLLAND

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